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Améliorer la qualité de l’air est-il un bon investissement?

Lors du forum de Davos, des systèmes de ventilation high-tech avaient été mis en place pour empêcher que le coronavirus ne circule parmi les participants. Serait-il « rentable » de généraliser ce type d’investissement pour la santé publique? Chronique par Cécile Philippe, présidente de l’Institut économique Molinari, publiée dans Les Échos.

Depuis le sommet du Forum économique mondial à Davos, en janvier , on sait que les élites ont pris la mesure du risque que pouvait poser le Covid-19 et ses multiples vagues, en particulier du fait des séquelles que peut laisser l’infection dans un certain nombre de cas. La question qui se pose aujourd’hui est de savoir si, pour la population générale, l’investissement dans la prévention sera jugé rentable et quand cela sera fait.

Une infection par le virus SARS-CoV-2 peut provoquer des symptômes prolongés, fluctuants et multisystémiques dans un certain nombre de cas (jusqu’à 12 % des personnes infectées et vaccinées, selon une étude publiée dans « Nature » et portant sur une énorme cohorte).

Connus sous l’appellation de « Covid long », les symptômes neurologiques et cognitifs sont parmi les plus répandus avec la fatigue, le « brouillard cognitif » et les problèmes de concentration, ce qui est particulièrement problématique pour la population qui tire principalement son revenu de ses capacités créatives et intellectuelles.

Les élites se protègent

Ces risques semblent avoir été intégrés par nos élites. Par exemple, les organisateurs du forum de Davos n’ont pas lésiné sur les mesures de protection mises en oeuvre pour limiter le risque de contamination et protéger le précieux capital humain de leurs invités. Le rapport coût-bénéfice a penché en faveur de l’investissement, notamment des systèmes de ventilation à la pointe de la technologie.

Le rapport coût-bénéfice est-il du même ordre en population générale ? Il est difficile de répondre simplement à la question dans la mesure où les pouvoirs publics ont progressivement abandonné toute tentative de limiter les infections, sans mettre en place les instruments de surveillance qui permettraient une meilleure compréhension de la dynamique épidémiologique.

La France n’a toujours pas les outils d’une veille sanitaire efficace. Elle n’a pas d’indicateur fiable de la proportion du nombre de cas en population générale, faute d’une cohorte suivie au fil du temps, de sondages au sein de la population ou d’une analyse systématique des eaux usées. Or, pour envisager une stratégie d’investissement, il faut des moyens de suivi qui permettent de quantifier la rentabilité de la prévention.

Des économies substantielles

Des éléments préoccupants indiquent pourtant que les marchés du travail sont impactés. Aux Etats-Unis, David Cutler, à l’université Harvard, arrive au coût significatif de 3.700 milliards de dollars sur cinq ans, en tenant compte de la perte de qualité de vie, la perte de revenu et la hausse des frais de santé. Le taux de participation à la population active n’y a pas encore retrouvé le niveau d’avant crise, il est toujours un point en retrait par rapport à la période avant Covid et stagne depuis mars 2022, selon le Bureau of Labor Statistics.

En France, sur les dix premiers mois de 2022, les indemnités journalières versées par l’Assurance Maladie au titre de la maladie (hors accident du travail) étaient en hausse de 49 % par rapport à 2019, de 19 % par rapport à 2021 et même de 5 % par rapport à 2020, époque où aucun vaccin n’était disponible.

Si un très grand nombre d'incertitudes continuent d'entourer le sujet, le rapport coût-bénéfice positif de l'investissement en faveur de la qualité de l'air pour les personnes aisées devrait nous motiver à faire l'évaluation pour la population générale, en gardant à l'esprit que le capital humain est une clé de la prospérité.

Cécile Philippe

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