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Détester les riches est une impasse

Et si l’on s’inspirait des plus aisés au lieu de les jalouser ? En imitant leurs comportements par exemple. Chronique par Cécile Philippe, présidente de l’Institut économique Molinari, publiée dans Les Échos.

Comme le constate le sociologue Olivier Galland dans une note récente pour Telos, « Le mouvement de contestation de la réforme des retraites est l’occasion, de façon incidente, de réactiver un vieux réflexe français, celui de la détestation des riches. » Ce sentiment, utilisé à des fins politiques par la CGT, EELV, la Nupes ou Oxfam pour s’attirer des soutiens, conduit fréquemment à tourner le dos à des solutions constructives. S’agissant des retraites ou de Covid, l’actualité montre qu’il serait dommage de ne pas s’inspirer des riches sous prétexte qu’ils seraient « détestables ».

Prenons le cas des dividendes qu’on devrait mettre au service des retraites. Dans un rapport récent de l’ONG Oxfam, les dividendes sont encore une fois mis au pilori. Ses auteurs proposent, sans aucune originalité, de « taxer nettement plus les versements de dividendes afin de mettre un terme aux profits de la crise. » Il aurait été plus ambitieux de reconnaître à quel point ces dividendes sont des outils puissants. Les « riches » savent mettre la bourse à leur propre service et la vraie révolution serait d’en faire bénéficier tous les salariés français. Il y a urgence à faire bénéficier toute la population de la capitalisation collective pour compenser la dégradation des retraites par répartition. On voit déjà les bienfaits de cette démarche à l’œuvre chez les fonctionnaires avec la Retraite additionnelle de la fonction publique (Rafp) rapportant en moyenne 5,6 % par an depuis sa création ou chez les pharmaciens (CAVP) dont une partie des cotisations est placée. Grâce aux rendements des marchés financiers, 40 % des cotisations financent 50 % des prestations. Il faudrait la généraliser à tous les salariés, ce qui permettrait aussi de garantir le partage le plus large possible des profits.

Autre exemple intéressant, celui des mesures sanitaires mises en œuvre contre la Covid. Alors qu’en France, les mesures de protection contre le virus ont encore été réduites le 1er février, tel n’a pas été le choix des organisateurs du Forum économique mondial lors de leur conférence annuelle de fin janvier. A contre-courant de l’idée qu’il ne serait ni utile ni possible de se mettre en ordre de bataille pour limiter les contaminations, le forum de Davos s’est déroulé dans un environnement sécurisé grâce aux conseils des meilleurs experts santé et virologues au monde. C’est un formidable arsenal de mesures qui attendait « les principaux leaders politiques, du monde des affaires, artistiques et intellectuels de la société » pour les protéger. Le site de conférence était équipé de systèmes de ventilation à la pointe de la technologie (filtres Hepa, lampes UVC…). Les participants pouvaient ainsi échanger sans crainte, sans avoir besoin de porter des masques. Ce déploiement indique combien le risque est pris en compte par certaines de nos élites et qu’il est possible de l’atténuer. Ne devrions-nous pas en tirer quelques leçons ? Des mesures efficaces sont à portée de main individuelle comme le port du masque, lorsque les cas remontent, ou collective, avec la ventilation des espaces publics. Sur ce point la France est très en retard, notamment dans l’équipement des écoles en purificateurs d’air.

Plutôt que d’alimenter l’instinct tribal qui fait des riches des ennemis, le vrai progrès social est de démocratiser les bonnes pratiques des plus aisés. La détestation stérile est une impasse.

Cécile Philippe

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