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Le recours à la téléconsultation et à la téléexpertise: quel impact économique attendre en France?

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Introduction

La téléconsultation, entendue comme une consultation à distance ou visio-consultation est intégrée dans la nomenclature de la Sécurité sociale depuis septembre 2018(1).

Son démarrage a été très lent, avec moins de 10 000 actes par mois jusqu’à l’été 2019(2). C’est l’épidémie de Covid-19 qui a permis sa banalisation. Le nombre de téléconsultations est passé de 40 000 par mois en février 2020 à 4,5 millions en avril 2020(3). Les trois quarts des médecins généralistes ont mis en place la téléconsultation, alors que moins de 5 % la pratiquaient avant la pandémie selon la Drees(4). Au cours de la première semaine du premier déconfinement, du 11 au 18 mai 2020, 7 médecins sur 10 ont réalisé au moins une téléconsultation. Parmi eux, 1 sur 10 ont fait plus de 25 % de leurs consultations par ce biais.

Pour autant, le volume de téléconsultation est redescendu rapidement, avec près d’un million d’actes mensuels pendant l’été 2020. Depuis, la téléconsultation fluctue autour de 5 % de la valeur des consultations traditionnelles des médecins et dentistes libéraux, avec un pic à 8 % en novembre 2020 (Figure 1).

A ce stade, le poids de la téléconsultation reste donc modéré. Certains restent sceptiques quant à son efficacité sanitaire mais aussi aux coûts qu’elle pourrait engendrer(5). L’objectif de ce travail est de fournir des éléments permettant d’objectiver les effets de la téléconsultation et de la téléexpertise sur les dépenses de santé.

La littérature récente sur le sujet note que le recours aux technologies de l’information et de la communication pour réaliser certains actes médicaux peut générer d’importantes économies sans nuire à la qualité des soins. Plus précisément, les études observent que le recours à ces technologies pourrait réduire les visites inutiles, désengorger les services d’urgence, limiter les dépenses de déplacement des patients et améliorer l’orientation des patients à travers leur parcours de soins.

Ces effets positifs tiennent à la conjonction de la téléconsultation et la télémédecine. La téléconsultation est une consultation donnée à distance par un professionnel de santé à un patient. La téléexpertise est un avis fourni à distance, à la demande d’un professionnel de santé, par un ou plusieurs autres professionnels (Zoom 1 page 9).

Dans la plupart des études, le médecin généraliste se trouve au centre du système : d’un côté, il peut proposer des téléconsultations à ses patients, lorsque ces derniers éprouvent des difficultés à se déplacer ou préfèrent le confort et la confidentialité de leur domicile. De l’autre, il peut directement solliciter l’avis de spécialistes avec la téléexpertise pour estimer la nécessité d’envoyer son patient vers un spécialiste et déterminer quel type de consultation est préférable, face à face ou téléconsultation.

Ainsi la téléconsultation, proposée directement aux patients, ou la téléexpertise organisée par le généraliste, participe à la rationalisation du parcours de soins.

A cet égard, l’efficacité de la téléconsultation et de la téléexpertise est d’autant plus importante que ces deux techniques sont utilisées conjointement : c’est parce que le généraliste peut recourir à la téléexpertise qu’il est en mesure d’orienter le patient vers la téléconsultation ; et c’est notamment parce que la téléconsultation se développe que la téléexpertise gagne en utilité du point de vue des spécialistes. En conséquence, et bien que cette étude porte sur les impacts de la téléconsultation, il a été décidé de l’apprécier dans le contexte d’une utilisation conjointe avec la téléexpertise.

A partir d’une revue de la littérature, une estimation de l’impact d’une généralisation de la téléconsultation, et de la téléexpertise, en France est fournie, qui se fonde sur les données de l’Assurance maladie et plus particulièrement de la base Open DAMIR(6).

Il ressort de cette étude qu’un développement de ces pratiques permettrait de réduire les frais de déplacement des patients de plus de 290 millions d’euros et à l’Assurance maladie d’économiser, a minima, 750 millions d’euros par an.

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Notes

  1. Advenier F & Reca M, Téléconsultations pendant le confinement en cabinet de ville, L’information psychiatrique, 96(8-9) : 607-615, 2020.
  2. Caisse nationale de l’Assurance Maladie, Cnam. (2019, 12 septembre). Premier anniversaire du remboursement de la téléconsultation [Communiqué de presse]. Repéré à
    https://assurance-maladie.ameli.fr/presse/2019-09-12-dp-remboursement-teleconsultation-1
  3. Caisse nationale de l’Assurance Maladie, Cnam. (2020, 16 septembre). Téléconsultation : une pratique qui s’installe dans la durée [Communiqué de presse]. Repéré à
    https://assurance-maladie.ameli.fr/presse/2020-09-16-cp-teleconsultation-anniversaire
  4. Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, D. (2020). Trois médecins généralistes sur quatre ont mis en place la téléconsultation depuis le début de l’épidémie de Covid-19. Etudes & Résultats, (1162). Repéré à
    https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/sites/default/files/2020-10/ER%201162-te%CC%81le%CC%81consultation-BAT.pdf
  5. Hashiguchi T, Bringing health care to the patient : an overview of the use of telemedicine in OECD countries, OECD Health Working Paper No. 116, 2020.
  6. Open DAMIR est la base de dépenses d’assurance maladie inter régimes. Les données sont issues du Système National Inter Régimes d’Assurance Maladie (SNIIRAM) portant sur l’ensemble des remboursements de l’assurance maladie tous régimes confondus. Elle fournit le détail des dépenses mensuelles de l’Assurance Maladie selon 55 variables. Pour chaque dépense, la nature de la prestation est renseignée, ainsi que le type d’établissement au sein duquel la prestation a eu lieu, mais aussi la nature et la spécialité de l’exécutant.

Pierre Bentata

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