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Obligation vaccinale : ne gaspillons pas les efforts des Français une fois de plus!

Pour l’Institut Molinari, les chiffres confirment qu’on ne peut pas « vivre avec » le Covid-19. Et afin d’éradiquer le virus, le vaccin ne suffira pas à lui seul… Texte d’opinion par Cécile Philippe, présidente de l’Institut économique Molinari, publié dans L’Express.

Juste après l’allocution télévisée du Président Macron annonçant la vaccination obligatoire pour tous les personnels soignants et l’élargissement du pass sanitaire à de nombreux lieux à partir du 21 juillet, le site de prise de rendez-vous en ligne Doctolib a explosé sous la pression des demandes. Le message est passé, au moins en partie. Ceux qui veulent continuer à profiter d’une vie relativement normale et aller dans les cafés, restaurants, centres commerciaux, vont devoir se faire vacciner pour empêcher la circulation du virus. Cette décision indique clairement que la stratégie du « vivre avec » est dépassée. Le nouveau « Vivre avec » le virus signifie empêcher sa circulation grâce au vaccin.

Sars Cov 2, qui ne cesse de muter, n’est donc pas un type de virus avec lequel il est possible de vivre sans réagir. Il oblige à faire des compromis permanents avec l’exercice habituel de nos libertés afin que nous ne soyons pas, à l’insu de notre plein gré, les vecteurs de la maladie. Le Président a tranché en faveur de l’outil technologique vaccinal en le rendant obligatoire pour tous ceux voulant vivre le plus normalement. Une question continue néanmoins de se poser : cela sera-t-il suffisant? Il est crucial d’y répondre sérieusement et non par un optimisme technologique béat, car il faut cesser de gâcher à répétition les efforts des Français. Il faudrait aussi éviter de décrédibiliser le vaccin, technologie prodigieuse, déjà sujette à un fort scepticisme.

Le vaccin est une solution pharmaceutique visant à éviter les contaminations et à limiter la sévérité de la maladie, quand elle touche néanmoins des personnes vaccinées. Le fait de bénéficier aujourd’hui de plusieurs vaccins efficaces est prodigieux. Leur efficacité a cependant été mesurée en présence d’autres mesures barrières, en vigueur au moment des tests, comme le port du masque. On constate malheureusement qu’elle diminue lorsque ces mesures sont baissées. Les données en provenance d’Israël sont claires. En dépit d’un niveau de vaccination record, associé à un contrôle strict des frontières, la levée des restrictions a entraîné de nouveaux foyers de contaminations au variant Delta. L’efficacité des vaccins ARN à éviter les contaminations est tombée à 70 % au lieu des plus de 90 % mis en avant initialement. Leur capacité à protéger des complications est toujours bien supérieure mais elle pourrait, elle aussi, faire l’objet de révisions.

Il est raisonnable de penser que le vaccin n’est qu’un élément dans la lutte contre ce virus qui mute rapidement vers des formes plus préoccupantes. Le port du masque, les tests, le traçage et l’isolement restent clefs dans le cadre d’une gestion du risque additive. Aussi, la suppression de la gratuité des PCR hors parcours médical à partir d’octobre prochain est une erreur. Les tests permettent de déceler la présence du virus et de déclencher les mesures indispensables pour casser les chaines de contamination. Il est contreproductif d’opposer vaccins et tests et de chercher à faire des économies sur les PCR.

D’une manière générale, la question économique est mal traitée depuis le début de la pandémie. Nous n’avons pas compris qu’éteindre la pandémie – en réagissant de manière préventive et radicale dès qu’un cas est détecté – est le meilleur investissement que nous puissions faire. Cela nous aurait permis d’éviter des confinements répétés et le stop and go mortifère que nous subissons depuis plus d’un an. Maintenant que le Président tranché en faveur du vaccin, en dépit de sa nouveauté, il est crucial de ne pas dilapider cet effort demandé aux Français et notamment aux plus réticents, en ne misant que sur celui-ci.

Avec le vaccin, nous pourrions bénéficier des avantages de Zéro Covid en dépit de nos erreurs. Cette stratégie permet à l’Australie et la Nouvelle-Zélande de limiter les pertes associées à Covid. Les données montrent que ces deux pays ont enregistré des taux de croissance significatifs (+1,8 % et +1,6 %) lors du premier trimestre 2021, alors qu’en France la croissance est restée légèrement négative (-0,1 %). Loin d’être une anomalie, ces chiffres confirment que Zéro Covid est la stratégie payante. Cette démarche a permis de préserver dans le temps la dynamique vertueuse enclenchée à l’issue du premier confinement, en limitant les contraintes pour la population. En 2020, le recul économique dans les pays Zéro Covid a été 3 fois moins important qu’en France et 2,5 fois moins prononcée qu’en Belgique. Même en mettant de côté le bilan sanitaire, avec 30 et 55 fois moins de morts, la supériorité de la stratégie d’élimination est évidente.

Ces pays Zéro Covid n’ont pas atteint à ce jour les niveaux de vaccination que nous avons obtenus. C’est un avantage que nous avons sur eux et dont nous pouvons aujourd’hui tirer les bénéfices, si nous ne commettons pas l’erreur de gaspiller nos efforts une fois de plus. Il est crucial de penser les vaccins comme une composante de la panoplie de la lutte contre covid. Les ériger en solution unique serait une erreur. Il est clef d’identifier et protéger des zones sans circulation virale. A ce titre, un contrôle renforcé du virus aux frontières est indispensable. Il serait impardonnable de nous infliger l’obligation vaccinale, compréhensible car il est impossible de vivre avec ce virus, sans l’intégrer dans une stratégie globale qui a fait ses preuves.

Cécile Philippe

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