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Covid-19 : la gratuité des tests, une erreur de gestion

En laissant dans un premier temps l’accès aux tests de dépistage totalement ouvert et gratuit à toute personne, le gouvernement n’a pas vu venir l’engorgement qu’une telle décision allait entraîner. Si la gratuité peut se comprendre pour les publics prioritaires, il aurait été normal de laisser le test payant pour les personnes asymptomatiques. Chronique par Cécile Philippe, présidente de l’Institut économique Molinari, publiée dans Les Échos.

Dans le cadre de la crise sanitaire causée par le Covid-19, les tests occupent une place cruciale. Après en avoir manqué dans un premier temps, nous avons cru pendant quelques semaines que nous nagions dans l’abondance. Nous découvrons avec effroi en ce début d’année scolaire que le problème n’est toujours pas réglé. Une erreur dans la gestion des tests a été de ne pas se servir des prix comme régulateurs de la demande. La gratuité ne rend service à personne. Une modulation tarifaire serait utile pour limiter les engorgements.

Une démarche économique

Les tests permettent de détecter la contagiosité d’une personne. Ils jouent un rôle sanitaire de premier rang, en permettant d’identifier les personnes contagieuses, de les isoler et de les traiter. Mais ils ont en plus un rôle collectif majeur. Ils rassurent les plus anxieux. Ils permettent à ceux qui veulent continuer leur vie sociale, de le faire en minimisant les risques pour leurs congénères. Par conséquent, la demande de tests est alimentée aussi bien par des besoins sanitaires que par des besoins psychologiques ou sociaux. Le déploiement des tests à grande échelle reste un élément clé de gestion de l’épidémie.

C’est aussi une démarche économique. En effet, tester est beaucoup moins coûteux que confiner les individus de façon indifférenciée, sans savoir si cette démarche est légitime ou non. Seulement, à l’heure actuelle il n’est pas encore possible de s’administrer soi-même le test. Il faut le réaliser dans un laboratoire, ce qui nécessite des moyens techniques et humains. Ces moyens, nous les avons en partie puisque les laboratoires biologiques de ville sont actuellement capables de réaliser plus d’un million de tests par semaine (contre 28 000 fin mars). Cette montée en puissance sans précédent constitue une prouesse qui devrait être saluée.

Cependant, avec la reprise de l’épidémie, cette cadence s’avère insuffisante. Après les hôpitaux et les cliniques, les laboratoires ne peuvent pas satisfaire un besoin qui augmente sans relâche. C’est pourquoi les laboratoires ont appelé les pouvoirs publics à mettre en place de nouvelles règles pour hiérarchiser les demandes. On a donc vu réapparaître des priorités visant à traiter de façon plus rapide les personnes symptomatiques, les cas contacts et les personnels soignants et assimilés.

Si ces règles semblent de bon sens, elles ne vont pas résoudre l’afflux lié à la multiplication des demandes individuelles.  La gratuité même sans ordonnance, décidée par les pouvoirs publics fin juillet, contribue à l’engorgement du système. Si la prise en charge intégrale fait sens pour toutes les catégories prioritaires, il serait utile de faire participer aux frais ceux souhaitant se rassurer ou rassurer les autres. Ces raisons sont importantes, mais elles ne sont pas essentielles. Une discrimination tarifaire aiderait à désengorger le système, en attendant des tests plus rapides, sans prélèvement dans un laboratoire biologique.

La Corée du sud qui reste encore aujourd’hui un exemple dans sa gestion efficace de la Covid-19 n’a pas rendu le test gratuit pour tous. Celui-ci a été, dès le début, facturé à ceux qui ne présentaient aucune des caractéristiques de la personne prioritaire.  Leur succès ne dépend pas uniquement de cet aspect, mais les Coréens ont pas commis l’erreur de rendre les tests totalement gratuits. C’est une petite leçon de pragmatisme et d’économie dont nous avons tort de nous priver.

Cécile Philippe

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