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Radio : Pour un relevé annuel des impôts et des charges

Chronique de Cécile Philippe, directrice de l’Institut économique Molinari, diffusée sur les ondes de Radio classique le 18 février 2014.

Chaque matin, dans «Des Idées Neuves», des professeurs, des directeurs de think tanks, des journalistes agitent, interrogent et bousculent notre système. Leurs projets de réformes inédites et iconoclastes pourraient inciter nos entreprises et nos institutions à imaginer un nouveau modèle économique.

Retrouvez Cécile Philippe, directrice de l’Institut économique Molinari, sur les ondes de Radio classique.

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Créer le Relevé annuel des impôts et charges; en quoi cela consisterait?

À faire en sorte que chacun reçoive, une fois par an, un relevé retraçant toutes les prélèvements obligatoires payés en son nom. De la même façon, les établissements bancaires sont tenus de récapituler annuellement l’ensemble des frais de gestion, les pouvoirs publics feraient de même en envoyant à tous les contribuables un relevé avec tous les impôts qu’ils ont, directement ou indirectement, supporté dans l’année.

À quoi cela servirait? A priori, chacun sait ce qu’il paie en impôts?

Pas vraiment. Autant c’est facile de savoir ce que l’on paie au titre de l’impôt sur le revenu, lorsque l’on fait partie de la moitié des ménages assujettis, autant c’est excessivement difficile de savoir ce que l’on est assujetti globalement.

N’oublions pas qu’en France, près de la moitié des prélèvements obligatoires sont aujourd’hui prélevés à la source, par les employeurs ou les intermédiaires financiers. C’est notamment le cas des cotisations sociales, payées au nom de l’employé par son employeur, et la CSG. Bilan: les contribuables n’ont plus aucune vision globale des prélèvements obligatoires payés en leur nom, et ce depuis plusieurs décennies.

À vous entendre, Cécile Philippe, on souffrirait d’un manque de transparence?

Oui, nous sommes dans le flou fiscal et social le plus complet! Pour avoir une idée des charges et impôts qu’on supporte, il faut extrapoler à partir d’études d’organismes spécialisés, comme notre baromètre annuel ou celui de l’OCDE. On pourrait aussi tenter faire soi-même ses calculs, mais personne ne les fait jamais, faute de temps ou de connaissances fiscales.

Imaginez que vous vouliez savoir combien vous supportez, directement ou indirectement de charges et impôts dans l’année. Il vous faudrait d’abord calculer les charges, cotisations patronales et salariales qui sont directement prélevés sur votre salaire au titre de la protection sociale. Il faudrait y ajouter la CSG et la CRDS qui sont prélevés sur toutes sortes de revenus du travail et du capital. À cela s’ajoute, bien sûr, l’impôt. Prélevé de façon indirecte, à savoir après déclaration des revenus par le contribuable, il a le mérite d’être relativement transparent. Mais l’addition n’est pas finie puisque nous supportons des taxes locales, comme la taxe d’habitation, voire des droits de mutation lorsque nous vendons un logement et réalisons des plus-values. Il y a bien sûr enfin, pour certains, l’impôt sur la fortune.

Plus personne n’a une vision concrète de la fiscalité à laquelle il est assujetti. Cet état de fait est totalement anormal. L’article 14 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 précise que: «Tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs Représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée.» Notre fiscalité s’est formidablement complexifiée depuis l’époque, mais à l’heure du tout numérique faire la transparence est devenue une chose simple. Alors allons-y! Demandons aux pouvoirs publics de le faire.

Au-delà de la transparence, quel est l’intérêt de cette démarche?

Donner une vision à chacun de ce qu’il paie, ou de ce qui est payé en son nom, est un enjeu majeur dans la situation actuelle. Depuis 1974, nous avons, année après année, des déficits publics. Nous savons tous depuis la dernière crise que cela ne peut plus durer. L’heure est à la remise en ordre de nos finances publiques. Dans ce contexte, la transparence fiscale et sociale permettra à tous de mieux sensibiliser les contribuables.

Elle permettra d’aider à prendre conscience que nous supportons tous des impôts, dans des proportions significatives, et qu’on ne s’en sortira pas par un tour de passe-passe. Nous sommes tous des contribuables et il est sain que nous sachions ce qu’on nous prélève et que nous puissions demander des comptes.

Cécile Philippe

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