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Radio : Fumer tue, manger, bouger… Supprimons les messages de santé publique!

Chronique de Cécile Philippe, directrice de l’Institut économique Molinari, diffusée sur les ondes de Radio classique.

Chaque matin, dans «Des Idées Neuves», des professeurs, des directeurs de think tanks, des journalistes agitent, interrogent et bousculent notre système. Leurs projets de réformes inédites et iconoclastes pourraient inciter nos entreprises et nos institutions à imaginer un nouveau modèle économique.

Retrouvez Cécile Philippe, directrice de l’Institut économique Molinari, sur les ondes de Radio classique.

Écoutez le podcast…


Supprimons les mentions « Fumer tue » / « l’abus d’alcool est dangereux pour la santé » / « évitez de manger trop gras, trop sucré, trop salé » sans compter les images chocs.

Oui car au risque de déplaire à nos auditeurs, le fait est qu’il n’est pas évident que ces mentions soient vraiment utiles, elles nuisent à l’efficacité des marques et créent un dangereux précédent qui nous emmène tout droit vers ce qu’il est maintenant coutume d’appeler le paquet générique ou paquet neutre.

C’est quoi ce paquet neutre ou générique ?

Il s’agit d’une idée de réglementation au niveau européen visant à interdire aux entreprises d’utiliser des représentations graphiques (logo, dessin, couleur ou tout autre signe distinctif) faisant référence à une marque et permettant de différencier leurs produits. Il s’agirait, par exemple de faire disparaître totalement le colonel de la marque de fast food KFC ou le Marlboro des paquets de cigarette du même nom.

Les marques ciblées sont principalement celles qui ont trait à un produit jugé mauvais pour la santé comme le tabac, l’alcool, les produits trop sucrés, trop salés ou trop gras.

Pourquoi parler de précédent en la matière ?

Justement parce que cette idée de paquet neutre est en fait l’aboutissement d’une logique maintenant bien ancrée. Elle consiste à obliger les marques à consacrer une partie de plus en plus grande de la surface de leur packaging à l’inscription de messages sanitaires ou d’images-choc. Du « fumer tue » aux différents messages du programme national nutrition santé crée en 2001, ils prennent de plus en plus de place et conduisent à terme à un effacement des marques.

On voit bien la logique mais n’est-ce pas quand même un moindre mal pour lutter contre les problèmes de malbouffe.

Vous avez raison. C’est bien ce qu’on a envie de croire. Sauf que l’efficacité sanitaire de cet effacement des marques est loin d’être évidente et qu’il va – au contraire – susciter nombre d’effets pervers.

Vous voulez dire que cela pourrait être contreproductif pour la santé ?

C’est bien ce que je crois car une telle politique ignore en fait qu’en matière de consommation, la souveraineté du consommateur prime. De deux choses l’une. Soit les consommateurs arrivent encore à distinguer leur marque préférée et la destruction des marques s’est avérée inutile. Soit, ils n’y parviennent plus et on risque de voir apparaître un processus de substitution en faveur de produits moins chers et pas forcément d’aussi bonne qualité.

Exemple

On a en la matière un exemple grandeur nature du côté de la Californie dans les années 90. Alors que les cigarettes sans marque ont, à l’époque, fait une percée, leur part de marché passant de 11 à 40 % entre 1988 et 1993 avec des prix de 20 % à 50 % moins élevés, il y eut une augmentation du taux d’initiation au tabagisme parmi les 12‐17 ans (…) Il n’y eut aucune réduction perceptible dans le nombre des personnes arrêtant de fumer.

Moralité, il faut sauver les marques

Oui, car on ne s’en rend peut-être pas facilement compte mais elles jouent un rôle crucial dans notre monde complexe.

La gestion d’une marque par une société l’oblige à être responsable et à agir constamment en faveur des clients, afin que leur verdict reste positif.
Il suffit d’un défi mal géré pour que des années de travail s’envolent. La sanction du marché peut être impitoyable et les entreprises le savent bien. En parallèle, les récompenses en termes de parts de marché sont aussi une puissante incitation à faire mieux que les concurrents, à les devancer, à innover pour offrir des produits moins chers et/ou de meilleure qualité aux consommateurs.

Bref, la marque, loin d’être notre ennemi, est le gage que son propriétaire va chercher à satisfaire ses clients dans la durée. C’est pourquoi les entreprises investissent des milliards chaque année dans cet actif intangible que constitue leur réputation. La marque McDonald’s vaudrait ainsi 95,2 milliards de dollars et Coca-Cola 74,3 milliards, avec respectivement plus de 27 et 61 millions de fans sur Facebook. Leurs propriétaires ont tout intérêt à gérer de façon responsable ce capital et il faut qu’ils puissent continuer à la faire librement.

Cécile Philippe

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