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Un conseil qui oublie l’économique et le social

Texte d’opinion publié exclusivement sur le site de l’Institut économique Molinari.

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) vient de proposer, le 15 juin dernier, de financer la dépendance via l’augmentation de la CSG sur tout ou partie des pensions de retraite et l’instauration d’une taxe sur les mutations à titre gratuit. Au même moment, la 3ème assemblée constitutionnelle semble être incapable d’éteindre l’incendie en sa propre « maison ». Son régime de retraite, fonctionnant en répartition depuis la fin des années 1950, accumule les déficits. Du coup, ses bénéficiaires appellent à l’aide les pouvoirs publics, afin d’éviter sa faillite. Une affaire ubuesque à double titre. D’une part, le régime de retraite du CESE bénéficie déjà de subventions conséquentes. D’autre part, on serait en droit d’attendre plus de clairvoyance et d’exemplarité de la part d’un conseil crée pour traiter des questions économiques et sociales.

L’affaire est tristement classique. Le régime de retraite du CESE est en bute au vieillissement. Alors que le nombre de cotisants n’évolue pas, le Conseil étant constitué de 233 membres, le nombre de bénéficiaires ne cesse de croitre tous les 5 ans au gré des renouvellements de l’assemblée. Résultat, le régime vit sur ses réserves et sera à court de financement dès 2015, avec un trou de 4 millions d’euros. Pour se sortir de cette ornière, le CESE propose d’abandonner une partie des avantages de ses futurs pensionnés, en rapprochant son fonctionnement de celui des régimes de la fonction publique. L’âge de départ à la retraite serait porté à 62 ans. La cotisation salariale, qui représente à peine 15% des recettes du régime, serait augmentée. Le taux des pensions diminuerait et le Conseil envisage même de rogner ses avantages familiaux, forts généreux. Et en dépit des aménagements proposés, le régime resterait néanmoins déficitaire.

D’où la proposition de faire appel en complément à la générosité du contribuable. Une approche saugrenue dans une période où les déficits publics et la dette atteignent des niveaux probablement insoutenables. D’autant plus que le coût de fonctionnement du Conseil est loin d’être anecdotique. Cette assemblée consultative qui ne siège que quelques jours par mois, coûte 38 millions d’euros par an au contribuable.

Plutôt que de faire appel à notre générosité, le Conseil pourrait avoir la décence d’équilibrer son fonctionnement ou de dissoudre sa caisse de retraite dans un autre régime. L’analyse du fonctionnement de ce régime montre en effet que le caractère dérogatoire et excessivement généreux explique une grande partie des déséquilibres. Les taux de cotisations à la charge des membres peuvent très facilement être augmentés et les prestations peuvent être revues à la baisse plus drastiquement que ne le proposent les membres du Conseil. Ces démarches permettraient de résorber une grande partie des déficits de ce régime réservé à quelques centaines de personnes.

En complément, les membres du Conseil pourraient opter pour un fonctionnement par point, permettant de lier le montant des prestations versées aux recettes dont ils disposent chaque année. La solution est d’autant plus simple qu’elle est parfaitement connue de nombre de partenaires sociaux siégeant aux CESE, par ailleurs en charge de la gestion des régimes complémentaires AGIRC ou ARRCO.

À défaut, le CESE pourrait opter pour une démarche encore plus simple et radicale, en faisant absorber son régime de retraite par celui du privé. Les taux de cotisations et les prestations seraient alignés sur ceux des salariés. Cette proposition serait d’autant plus logique que l’existence depuis 1957 d’un régime particulier de retraite au CESE pose un problème d’équité et de cohérence. Il est en effet surprenant qu’un organisme connu pour défendre une conception uniforme et égalitaire de la protection sociale se soit doté d’un régime de retraite privilégié.

L’aspect le plus choquant réside dans ce décalage entre discours et pratique. C’est d’autant plus incompréhensible que le Conseil fait aujourd’hui appel à la solidarité nationale pour éponger des déficits qui étaient prévisibles, tout en refusant d’appliquer les méthodes que ses membres mettent en oeuvre dans les régimes du privé dans ce genre de situations.

Nicolas Marques est chercheur associé à l’Institut économique Molinari.

Nicolas Marques

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