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Les contrats aidés, ou comment prolonger la crise économique

Article publié exclusivement sur le site de l’Institut économique Molinari.

Dans le grand discours sur l’emploi qu’il a prononcé fin octobre à Rethel, Nicolas Sarkozy a notamment annoncé la création de 100 000 contrats aidés supplémentaires pour 2009, pour faire face aux conséquences sociales de la crise. Il y a quelques jours, François Fillon affirmait que « ce n’était pas une solution au problème du chômage », mais que l’on devait néanmoins y voir un « amortisseur ». En réalité, les contrats aidés prolongeront la crise économique et freineront la croissance en maintenant artificiellement dans certains secteurs de la main-d’oeuvre qui serait plus productive ailleurs.

On distingue de nombreux types de contrats aidés : contrat d’accompagnement dans l’emploi, contrat initiative emploi, contrat d’avenir, contrat jeune en entreprise, etc. Tous sont, en général, ciblés sur un public particulier : chômeurs de longue durée, bénéficiaires du RMI, jeunes. Leur principe est relativement simple : il s’agit de créer des incitations à l’embauche, financées par des fonds publics, pour les employeurs.

Néanmoins, si un emploi doit être aidé, c’est qu’il n’a pas de pérennité économique dans le contexte réglementaire actuel. En aidant les employeurs à embaucher, l’État reconnaît implicitement que le coût du travail est, pour eux, prohibitif. La France, en conservant un droit du travail complexe et volumineux ainsi que des charges sociales qui, selon l’OCDE, sont parmi les plus élevées d’Europe, augmente le coût du travail et exclut les moins productifs du marché de l’emploi. En d’autres termes, de nombreuses personnes aujourd’hui concernées par les emplois aidés auraient été embauchées normalement sur le marché du travail, si son coût avait été moindre.

Mais ce n’est pas tout. Les contrats aidés sont également pernicieux car ils détournent de la main-d’oeuvre des secteurs de l’économie où elle aurait été mieux employée. En effet, quand elle est financée par des fonds publics, la politique des contrats aidés génère des opportunités artificielles d’embauche dans certains secteurs, sans considération pour la pertinence économique des emplois ainsi créés.

En France, le secteur associatif est le premier employeur de contrats aidés. En l’absence de ces aides et d’autres rigidités, les personnes concernées auraient pu être embauchées dans d’autres secteurs. Au final, en multipliant les contrats aidés, on détourne donc de la main-d’oeuvre des domaines où elle aurait été mieux employée, c’est-à-dire où elle peut servir à la production de services plus créateurs de valeur pour les consommateurs plutôt que d’autres services moins valorisés par ces derniers.

Ces effets sont d’autant plus visibles que la conjoncture est mauvaise. En période faste, cela se traduit par une croissance moindre. Mais en période de crise, les emplois aidés ont des conséquences plus dommageables sur l’économie. En maintenant artificiellement des emplois qui n’auraient pas existé autrement, ils ralentissent le nécessaire transfert de main-d’oeuvre des secteurs les moins productifs vers ceux qui le sont davantage et, par conséquent, retardent la reprise.

Une crise économique survient lorsque des capitaux ont été massivement investis dans des activités non productives au lieu de se diriger vers les activités réellement créatrices de richesses. L’économie ne redémarre véritablement que lorsque ces ressources mal affectées ont été transférées des secteurs non-productifs vers ceux qui le sont davantage. Ce processus implique aussi des transferts de main-d’oeuvre, celle-ci devant se tourner vers les activités créatrices de richesses.

Ainsi, la longueur de la crise dépend directement de la flexibilité du marché du travail. Plus les rigidités sont importantes, plus le marasme économique ou la récession sont durables. Une grande mobilité de la main-d’oeuvre permet au contraire une reprise forte et rapide de la croissance économique.

En annonçant la création de 100 000 emplois aidés supplémentaires le gouvernement fait fausse route et entrave le nécessaire processus d’ajustement des structures de production. Ainsi, les contrats aidés n’atténueront pas les effets de la crise économique, mais les prolongeront en retardant le transfert de la main-d’oeuvre de certaines activités non productives vers des activités productives. À l’inverse, les mesures facilitant la mobilité entre les secteurs accéléreront le retour de la croissance. Cela suppose de lever nombre des rigidités réglementaires contenues dans le Code du Travail.

Guillaume Vuillemey, chercheur, Institut économique Molinari

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